“Là, quelque part” est un recueil de photographies prises par Héloïse Barreau, qui m’a fait l’amitié, il y a quelques mois, de me proposer d’en rédiger la préface afin de présenter son travail.
Je vous invite donc à découvrir ce texte accompagné de quelques photos exclusives à parcourir en avant-première.
Le livre est actuellement disponible à l’achat en précommande. Une idée pour vos cadeaux de Noël ? Dans tous les cas, n’hésitez-pas à me laisser un message si les photos vous ont plu ou si vous souhaitez recevoir l’ouvrage signé par Héloïse.
Itinéraire artistique
Née en 1986 à Paris, Héloïse Barreau découvre la photographie à l’adolescence, quand chaque passe-temps ressemble à une raison de vivre. Désormais graphiste et photographe professionnelle, elle a organisé plusieurs expositions et anime une communauté en ligne. Notre rencontre, il y a trois ans, m’a fait réaliser qu’une photographie pouvait être autre chose qu’un souvenir fugace publié sur Instagram.
Sur les réseaux sociaux, la plupart des photos sont « parfaites », agencées précisément afin de donner envie, filtrées de tous les défauts qui font pourtant le sel de la vie. Des produits souvent vides, simples reproductions d’un mensonge bien encadré. De même qu’une parole peut ne rien dire, une photographie peut ne rien montrer.
Avec Héloïse, au contraire, la photographie dévoile une vérité enfouie, oubliée. Un témoignage visuel qui ne donne pas toujours envie, mais qui fait prendre conscience, qui ouvre vers ce que l’on n’aurait pas réussi à regarder soi-même.
Récit artistique
Vous ne trouverez dans ce livre ni élément de contextualisation, ni légende. Héloïse est photographe, c’est-à-dire qu’elle s’exprime essentiellement par ses photographies. Que cherche-t-elle à nous dire ? Deux tensions semblent parcourir ses recherches.
La première est créée par la lumière contre la géométrie du quotidien. Les scènes sont souvent banales : une chaise contre un mur, des fils téléphoniques pendus au-dessus d’un champ, des façades vitrées d’immeubles modernes, des fissures dans une paroi. Héloïse regarde. Elle observe l’écho de la lumière sur ces surfaces nettes. Naturelle ou artificielle, la source lumineuse crée une atmosphère unique, découpée du reste du monde. Pas d’humain, seulement ses traces. Les scènes sont souvent froides, solitaires – voire abandonnées. Mais la lumière intervient, et rappelle que rien n’est tranché, tout est nuance.
L’autre tension provient du dialogue incessant entre le corps et l’âme. C’est, selon moi, la raison pour laquelle Héloïse a longtemps préféré le noir et blanc. Comme pour désapprendre l’évidence de ce que l’on voit, et proposer une meilleure traduction de ce que l’on ressent. Cette recherche l’a aussi conduite à proposer en 2022 des superpositions photographiques pour accentuer des émotions. Ces illusions rêveuses contrastent avec les espaces, a priori peu bavards, qu’elle photographie. Elles ajoutent des points de suspensions à des histoires sans réel dénouement, des doubles narrations mouvantes que l’on retrouve aussi dans cet ouvrage.
Depuis, l’artiste a ouvert de nouvelles perspectives en retrouvant la couleur, et en y ajoutant la peinture.
Là, quelque part
« Là, quelque part ». Le titre sonne comme un éternel syndrome de l’imposteur face à la vie. Une ritournelle indécise et confuse d’une mélodie qui, pourtant, continue à battre. On fixe le plafond, un soir, en se demandant si c’est bien cela le monde. Un bout de papier-peint ? Une ampoule qui s’éteint ?
Les photos proposées par Héloïse expriment cette sensation d’incomplétude, celle de l’incompréhension face à la solitude, et de la peur d’une vie qui n’aura servi à rien. Mais en retrouvant la couleur dans ce livre, Héloïse semble dépasser ses angoisses en révélant une présence, une vie qui se joue derrière la surface, tel le sang sous la peau. Ici, la couleur supprime la tentation nihiliste du doute d’exister, et crée une ligne de crête de la désolation vers l’espoir. Héloïse accepte ces craintes que nous portons tous, là où tant d’autres les fuient.
De la couleur donc, mais pas seulement. De la peinture aussi, et plus précisément de l’aquarelle. En parcourant les photos de ce livre, on entend presque le bruit du pinceau contre le papier sulfaté, le souffle retenu pour ne pas faire baver la peinture. Le « souffle » est le mot important, car il induit un élan. Là où une photographie fige un mouvement, l’aquarelle le prolonge. Une photographie imprime un instant tandis que l’aquarelle imprègne une atmosphère sur un papier. Le « temps est supérieur à l’espace » a écrit le Pape François dans Evangelii Gaudium. Je comprends désormais mieux ce qu’il a voulu dire. Seul ce qui s’écoule est vivant. Le mouvement est un présent toujours renouvelé, comme une source d’eau vive.
Ces photos sont vivantes car elles parlent de nous.
Pour en savoir plus sur le travail d’Héloïse Barreau : – Pour commander son livre-photo ‘« Là, quelque part » – Site internet pour retrouver son travail et ses différentes expositions |
4 comments
Merci pour ce partage rare
Juste uin autre commentaire pour demander les email d’information oubliés au premier tour. Quoi qu’il en soit et quel que soit le style, je suis bluffé, Belle journée ou soirée selon
Merci beaucoup pour vos deux retours de lecture ! Pour contacter directement Héloïse, voici le lien pour la contacter via son site internet : https://heloisebarreau.com/contact . De mon côté, voici mon mail : baudouin.duchange[at]gmail.com
Magnifiques clichés, quel œil et quelles synchronicités visuelles, terrible, magnifique encore une fois